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Un avortement rempli d'amour

AVERTISSEMENT: Le contenu de cet article peut être sensible pour certaine personne. #Avortement #Interruptiondegrossesse #Deuilpérinatal
 

Avant de commencer je tiens à dire que ceci est MON histoire. Je l’écris à l’occasion de la journée mondiale de sensibilisation au deuil périnatal car TOUS les types de deuils ont leur place et sont valable! Qu’un avortement, peu importe sa raison peut mener à vivre un deuil périnatal aussi. Je souhaite aussi raconter mon histoire pour présenter une autre façon de vivre un avortement mais aussi pour montrer la complexité du système. Je conviens que mon histoire peut être confrontante pour certain.e.s mais elle est importante à raconter pour normaliser toute cette situation.



Jeudi 5 août 2021 : Le test est positif ! Je suis enceinte ! O.M.G! !!! Qu’est-ce qu’on va faire ? Notre couple ne vole pas à son plus haut, en grande partie dû à ma santé mentale fragile… Est-ce que notre couple va survivre ? Est-ce que JE vais survivre ? Et tellement d’autres questions se bousculent! Mon conjoint a un rire jaune empli de panique ! Ses yeux crient NON ! Je dois avouer que ma première réaction à moi aussi a été NON !

Ses yeux crient NON ! Je dois avouer que ma première réaction à moi aussi a été NON !

Mercredi 11 août 2021 : Grande discussion avec mon conjoint. Je me rends compte que je n’ai vraiment, mais vraiment pas le goût de passer par un avortement ! Ayant déjà vécu une aspiration à 14 ans, je ne peux me résoudre à réentendre ce son et revivre ce feeling ! Hors de question ! En plus, contrairement à mes 2 autres grossesses, je sens une connexion avec cette petite croquette ! Je lui parle ! Je n’avais jamais fait ça aux autres ! Je sais que je ne peux pas forcer mon chum à accepter ce bébé… mais il ne peut pas non plus me forcer à interrompre la grossesse. Que faire ?


Un chemin vers l'acceptation


Lundi 16 août 2021 : Ma décision est prise ! Je garde ce bébé et je fais confiance à la vie ! Nous voulons faires les prénatests plus poussés afin de s’assurer qu’aucune anomalie génétique n’est présente. Ce serait la seule raison qui me ferait accepter une interruption de grossesse (avec un fils qui a un syndrome rare qui nous demande beaucoup de jus … un c’est assez !).


« On va garder confiance! »

Jeudi 19 août 2021 : J’écris à mon amie : « On va garder confiance ! Si ce bébé est pour être dans nos vies, il va l’être. S’il est là pour avoir passé brièvement, m’avoir fait revoir ma vision de la maternité, me faire vivre un deuil périnatal et ensuite continuer alors ce sera ça ! Je suis contente du temps que je peux passer avec cette petite croquette pour le temps qu’elle va rester avec moi ! En espérant que ce soit le plus longtemps possible ! »


SURPRISE!!!!


Mardi 7 septembre 2021 : Écho dating…. SURPRISE ! Il y a 2 croquettes ! CHOC x 10 000 000 000 pour moi et je crois bien qu’une crise de cœur serait la meilleure façon de décrire la réaction de mon chum ! On va avaler la nouvelle, mais il faut tout de même réfléchir vite, je suis déjà à 9 semaines ! Je réussis à avoir un rendez-vous avec ma sage-femme le lendemain matin.


« Je ne veux pas revivre d’avortement ! Je veux les garder ! »

Mercredi 8 septembre 2021 : OMG que j’aime cette femme ! Je suis si heureuse que ce soit Elle encore qui me suive ! Elle a été avec nous pour le début de ma première grossesse, pour la naissance de mon 2e fils et maintenant elle est encore là avec moi ! Merci J ! Pour tout, vraiment ! On discute de la réalité que je vis, de la réalité d’avoir des jumeaux. De ce que je suis prête à accepter et ce que je ne suis pas prête. On discute de mes différentes options… Quand elle me demande : « Ton cœur, il te dit quoi ? » Ma réponse est instantanée « Je ne veux pas revivre d’avortement ! Je veux les garder ! » Mais après je suis consciente de toutes les difficultés qui se dressent devant moi et je doute fortement que mon couple, ma santé mentale et ma sécurité (moi envers moi-même) soient assez solides pour vivre tout ça ! Je reviens toujours sur : « Je ne veux pas d’avortement ! Je ne veux pas non plus de ce suivi de grossesse gémellaire HYPER médicalisé et de devoir continuellement me battre pour mes volontés, mes droits, avoir peur d’avoir peur, perdre mon suivi sage-femme, ne plus pouvoir faire de naissance à domicile, avoir la menace de césarienne qui plane sur ma tête continuellement… NON je ne veux VRAIMENT pas ça ! »

« Non! Je ne veux VRAIMENT pas ça! »

Ma sage-femme me parle de l’interruption médicamenteuse. Je me rappelle alors un article de Quantik Mama que j’avais lu « Une fausse couche pleine de grâce ». Et c’est LÀ que je le vois ! Clair comme de l’eau de roche dans ma tête ! Cette interruption dans l’amour, dans la paix, dans la chaleur de notre domicile, entourée des gens que j’aime et qui m’aiment, qui m’appuient. C’est LÀ que je sais… ces petites croquettes ne seront pas là pour rester, mais pour m’enseigner quelque chose de plus grand que moi !


Et c’est LÀ que je le vois ! Clair comme de l’eau de roche dans ma tête ! Cette interruption dans l’amour, dans la paix, dans la chaleur de notre domicile, entourée des gens que j’aime et qui m’aiment, qui m’appuient. C’est LÀ que je sais…

Une bataille qui commence


J’appelle donc, en sortant de la maison de naissance, au centre de planning des naissances pour demander la médication rapidement étant donné mon terme qui est déjà bien avancé. Je laisse un message sur le répondeur.


Entre temps, je parle avec une amie merveilleuse (je remercie tellement la vie d’avoir placé sur mon chemin cette femme), qui travaille à accompagner les personnes dans le processus d’interruption de grossesse et qui a même créé la première école de formation pour l’accompagnement à l’interruption de grossesse – Les Passeuses. (Merci mille fois Marie-Ève.) Elle m’explique comment se passe une IVG à la maison, mais surtout elle me met en garde. Le fait est que la grossesse est de plus de 9 semaines et normalement l’interruption médicamenteuse n’est pas possible au Québec passé 9 semaines. Cependant, dû à la pandémie et à la difficulté d’accès à l’avortement, une recommandation de la SOGC a été émise afin de permettre de le faire jusqu’à 10 semaines (ce qui est fait dans beaucoup de pays), on appelle ça une utilisation « hors étiquette », ce qui est fait aussi dans beaucoup d’autres spécialités couramment.


(Les risques de cette technique sont une hémorragie, une infection, une nécessité de faire une aspiration ou un risque de devoir faire une hystérectomie et un risque de traumatisme dû à la vue de l’embryon. Information importante à savoir, une grossesse gémellaire n’est pas un facteur de risque aggravant pour cette technique-là.)


Mon amie me transmet le document qui valide la pratique en me précisant qu’il est fort possible que les départements n’aient pas reçu cette recommandation encore. De nature optimiste, je me dis, ils vont comprendre la situation et franchement, ça ne se peut pas qu’ils n’aient pas la recommandation ! Non ?


Mercredi après-midi, toujours pas de retour du centre de planning alors je décide de rappeler, on me confirme que je dois attendre le retour…


Je n’imagine pas ce qu’une femme qui est enceinte suite à une agression ou dans une situation vraiment autre que la mienne doit ressentir.

Jeudi 9 septembre 2021 : Toujours pas de retour d’appel, je rappelle et mentionne l’urgence vu mon nombre de semaines sur le message vocal que je laisse. On me rappelle enfin sur l’heure du diner pour me dire que l'intervention médicamenteuse ne serait pas possible, mais que de toute façon chez eux, ils n’ont pas de disponibilité pour l’intervention avant le 20 septembre ! LE VINGT !!! Sérieux ? Je n’imagine pas ce qu’une femme qui est enceinte suite à une agression ou dans une situation vraiment autre que la mienne doit ressentir de devoir attendre encore 11 jours…. On me recommande donc d'appeler à un autre hôpital de ma région. J’appelle immédiatement et on me dit encore de laisser un message, ce que je fais, en prenant la peine de mentionner ma situation et qu’un retour rapide est attendu. Je sais maintenant que je peux me rendre jusqu’à 10 semaines, mais il semble que je vais avoir plus de difficulté que je croyais et surtout je ne suis pas inconsciente ! Je connais les risques et je sais que plus j’avance dans le temps les risques augmentent et je suis prête à faire ça en fin de semaine !

Je suis prête
Ma doudou papillon

Durant la journée, je magasine pour trouver la petite boîte parfaite pour mes croquettes pour les enterrer adéquatement. J’ai trouvé un ange qui a accepté de me faire la boîte parfaite pour eux dans les temps. Je réussis aussi à trouver une couverture magnifique assez longue pour pouvoir la séparer en deux afin qu’ils soient enveloppés dedans et que je puisse en conserver un bout. Je porte la couverture sur moi à partir de ce moment. Finalement, je trouve deux petits oursons trop mignons, que je conserverais en souvenir.


Milieu pm, je rappelle pour RÉexpliquer l’urgence de ma situation. La réceptionniste ne peut pas rien faire, c’est lae gynécologue qui doit absolument me rappeler….


Je reçois enfin cet appel-là vers… 18h30…


Pourquoi ne me laisse-t-on pas accueillir mes croquettes comme je le souhaite, leur donner de l’amour comme iels le méritent et leur faire un hommage selon nos valeurs ?

Je parle avec la Dre et tout semble vraiment irréel… On me refuse les médicaments, car je suis dépassé 9 semaines. Je prends le temps d’expliquer ma situation et que je suis très bien informée et consciente des risques: doula de formation, accompagnée par une amie accompagnante à la naissance ET une accompagnante à l’interruption de grossesse en plus de ma sage-femme. Je connais mes droits, je connais les recommandations, je connais les risques, etc. Pourquoi ne me laisse-t-on pas accueillir mes croquettes comme je le souhaite, leur donner de l’amour comme iels le méritent et leur faire un hommage selon nos valeurs ? Pourquoi ne pas comprendre que de faire une interruption par aspiration pour moi est un enjeu psychologique ? Que je ne sais pas si je vais m’en remettre et que de seulement faire face à cette solution me remplit d’anxiété et de stress. On me dit qu’on va peut-être me rappeler demain, sinon ça va aller à lundi ! LUNDI !?!? Je vais être rendu à 9,6 semaines… autrement dit je ne serais plus admissible… Je raccroche le téléphone dévasté… Mon conjoint, qui est arrivé à la maison durant l’appel, me retrouve étendue sur le lit en pleurs. Je ne suis plus toute là, je ne fais que flatter les petits oursons en me demandant pourquoi la vie me fait subir tout ça.


Je reprends espoir et me dit qu’elles ne me feraient pas venir pour me dire… non?

Vendredi 10 septembre 2021 : Toujours en contact avec mon accompagnante à l’interruption et de ma sage-femme, on se dit qu’on ne doit pas lâcher, Marie-Ève me donne plusieurs références d’autres cliniques à Montréal qui pourrait peut-être être en mesure de m’aider. J me soutient et m’encourage. Je décide de rappeler directement à la maternité où la dre avec qui j’ai parlé la veille travaille en expliquant la situation à l’infirmière et en lui demandant de faire le message qu’on me rappelle le plus rapidement possible. En chemin pour aller chercher ma petite boîte pour mes croquettes, je reçois un appel de la clinique. « Pouvez-vous être là d’ici 1 h ? » « OUI ! » Je reprends espoir et me dit qu’elles ne me feraient pas venir pour me dire… non? Lorsque j’arrive au rendez-vous, la doc est avec la travailleuse sociale (hum.. OK !), moi je suis en ligne avec Marie-Ève et mon chum qui me supportent et écoutent tout.

Impossible

« Impossible… On est désolé, mais c’est non ! On a tout essayé, on a appelé partout, mais on ne peut pas…. » WTF… Qu’est-ce qui se passe ? Je me défends, débats mon point et tente de garder mon calme tout en pleurant toutes les larmes de ma vie ! « Vous ne comprenez pas que ce n’est pas que je ne les aime pas ces bébés-là, mais que le timing et notre situation ne me le permettent seulement pas ! Réalisez-vous qu’en ce moment vous m’obligez à me battre pour quelque chose que je devrais avoir le droit de choisir et qu’au final vous ne me permettez pas de choisir la façon dont je crois que mes enfants méritent de partir et la façon dont je veux vivre cela ? C’est inhumain!!» Un moment donné durant la rencontre, pendant que mon accompagnante essayait de trouver des solutions avec la doc, je me suis fermée… un beau gros shutdown émotionnel ! Mes larmes coulaient toutes seules, mais je ne pleurais plus, je n’étais plus fâchée, je ne ressentais juste plus rien… Je répondais machinalement et j’ai fini par dire : « Bon bien c’est fini ? Je peux partir ? De toute façon, je n’ai pas le choix, c’est ce que vous me dites ! C’est mon corps, mes bébés, mais je n’ai pas le choix. En fait oui, j’ai un choix, soit de vivre une aspiration et de vivre après le risque de me mettre en situation critique psychologiquement ou encore de garder ces bébés alors que je sais que nous ne serons pas en mesure de les aimer comme il se doit et que je risque encore là un autre gros break-down et que je mets ma famille, ma santé mentale et mon couple en jeu… Vous me dites qu’un autre hôpital va me rappeler pour la procédure, alors je n’ai plus rien à faire ici. »


Mes larmes coulaient toutes seules, mais je ne pleurais plus, je n’étais plus fâchée, je ne ressentais juste plus rien…

Souvenir de ma petite bedaine qui abrite la vie

Je ne me souviens plus vraiment du chemin de retour à la maison, j’étais complètement déconnecté, j’avoue que je n’aurais peut-être pas dû prendre ma voiture… Le soir, je parle avec J et lui dit : « Ils ont gagné… je vais faire ce qu’ils veulent, je suis épuisée et je veux seulement que ce soit fini… » Elle me répond : « Laisse-moi faire un dernier appel » et on raccroche. Je ne sais pas s’il s’est passé une minute complète après que j’ai raccroché avant que je reçoive un message texte de Marie-Ève qui me dit : « HEY ! Dr X en fait régulièrement jusqu’à 70 jours. Elle accepterait de te voir, mais à Montréal au centre X. […] ça devrait marcher ! Tu obtiendras la méthode de ton choix, comme tu le désires. Tu pourras faire une cérémonie remplie d’amour ! » Malgré que je n’ose pas me réjouir trop vite tant que je n’ai pas les médicaments en ma possession j’avoue que l’espoir est remonté en flèche à ce moment hein ! Je rappelle J qui se réjouit énormément pour moi !


Enfin, l'univers conspire pour moi!

«  […] ça devrait marcher ! Tu obtiendras la méthode de ton choix, comme tu le désires. Tu pourras faire une cérémonie remplie d’amour ! »

Samedi 11 septembre 2021 : 11H11 – Je reçois un appel de la Dre de chez elle, elle a trouvé une clinique qui accepte de m’ouvrir un dossier en ligne sans que j’aie besoin de me déplacer à Montréal et une pharmacie à Québec qui tient les médicaments nécessaires et en ont en stock ! Elle me dit : «Tu vas pouvoir avoir tes médicaments aujourd’hui ! » Je ne comprends plus trop ce qui se passe ! J’étais tellement certaine hier que tout était fini et là cette ange me dit que tout est possible ! Sérieusement, cette doc est merveilleuse ! J’en aurais vraiment long à raconter de notre échange, une femme merveilleuse ! Elle prend le temps de m’écouter, de m’informer et de me réconforter ! Une fois tout fait, et après l’avoir remerciée mille fois, je me dirige donc vers la pharmacie de Québec pour aller chercher la médication. Mon conjoint me demande si je veux qu’il soit présent, mais nous avons les enfants et je sens que je dois faire ça seule. En fait, je vais devoir prendre la première pilule qui interrompt la grossesse directement à Québec si je veux que dans les temps le tout soit terminé le lendemain soir. Je dois aussi remercier la pharmacienne qui a vraiment été superbe (sérieux je n'en reviens pas que l’Univers conspirait enfin à m’aider et enlignait TOUT !)

« Tu vas pouvoir avoir tes médicaments aujourd’hui ! »

15H30 – C’était une vraiment belle journée, chaude, un beau soleil, une petite brise très légère. Je décide de me rendre sur le bord de la rivière. Je prends le temps de parler à mes croquettes, leur dire à quel point je les aime, que je suis reconnaissante qu’iels m’aient choisie comme maman, mais leur explique que ce ne sera pas possible. Je leur demande d’aller trouver une autre famille qui saura bien les accueillir et qui aura de l’espace dans leur cœur et dans leur vie pour eux. Tout d’un coup, le vent se lève et les roseaux devant moi se mettent à danser de tous les côtés, j’y ai vu un signe, c’était le moment… Je leurs dis aurevoir et je prends la pilule.


Je leurs dis aurevoir et je prends la pilule.

Dimanche 12 septembre 2021 :


15H30 – Mon amie et accompagnante à la naissance arrive chez moi (Merci tellement Sarah d’avoir été là pour moi! C’était parfait, tu étais parfaite! )

16H00 – Supporté par mon conjoint, je prends la première dose de Misoprostol. Nous sommes dans ma chambre, l’ambiance est douce, Tracy Chapman joue, la lumière de fin de la journée entre par les fenêtres. Nous parlons, nous rions, nous philosophons ! La chambre est emplie d’amour, de chaleur, de tendresse et d’empathie ! Je ressens quelques petites crampes, mais rien de bien dérangeant. Heureusement, je n’ai pas les gros désagréments intestinaux qui peuvent survenir et mon estomac est seulement un peu fragile ! Nous attendons, patientons et laissons le temps faire son œuvre. Les crampes deviennent de plus en plus inconfortables, mais encore là, rien de non gérable.



19H30Ça fait maintenant 3H30 que j’ai pris la première dose, la doc m’avait dit que normalement la fausse-couche se produit dans la première heure, mais que ça peut prendre jusqu’à 4H. Je commence à m’inquiéter. Mis à part quelques goûtes de sang, rien de plus. Dans sa grande gentillesse, elle m’avait laissé son # de cellulaire au cas. Je la texte donc et elle me rassure, parfois à ce stade ça peut prendre la 2e dose. Rien de bien inquiétant, on se laisse encore un peu de temps. Je prends donc la 2e dose. Mon conjoint va endormir les enfants, qui sont de retour, pendant que je demeure avec S.

« Tu l’as fait !! Tu as réussi !!! Tu l’as fait comme tu voulais ! »

19H45/50 Je suis dans mon lit et je me dis que je vais bouger un peu, peut-être même essayer de pousser. Je m’installe donc à genoux sur le piqué avec mon bol et soudainement une grosse contraction. Je n’ai que le temps de placer le bol sous moi et ma première croquette sort ! La doc m’avait prévenu qu’il était possible que j’aie de la difficulté à voir ou à comprendre ce que je regarde… Mais iel est là ! Intact ! Magnifique et propre ! Incroyable ! Je suis subjuguée, mais en même temps affolée… et si j’avais perdu l’autre sans m’en rendre compte dans la toilette un peu plus tôt… Pendant qu’on réfléchit, une nouvelle contraction arrive et le voilà ! Ma 2e petite croquette aussi magnifique que la 1re. Mon amie me regarde et n’en revient pas. Elle n’arrête pas de me dire : « Tu l’as fait !! Tu as réussi !!! Tu l’as fait comme tu voulais ! » Je suis tellement reconnaissante et soulagée. Je suis en paix, je me sens bien !


20H30 – Mon amie est partie et après avoir terminé d’endormir les enfants, mon conjoint et moi allons nous recueillir auprès de nos bébés. Nous prenons le temps de leurs dire au revoir et qu’on les aime. On les enveloppe dans la couverture et place dans la petite boîte.

Je suis tellement reconnaissante et soulagée. Je suis en paix, je me sens bien !

La boîte qui est la dernière demeure de mes petites croquettes
Boîte à papillon


19 septembre 2021 : Accompagnés des enfants qui ont été mis au courant, nous enterrons nos croquettes dans un grand pot, avec une plume dessus, et plantons un magnifique cerisier. Celui-ci nous offrira de magnifiques fleurs au printemps et durant la même période de l’année de leur passage avec nous, nous aurons des cerises pour nous rappeler que dans chaque situation qui semble horrible, des fleurs et même des fruits peuvent en ressortir ! Notre famille se renforcie de jour en jour. Cette épreuve nous aura réunis, heureusement.


L'arbre qui nous rappel que même les pire situation apporte du beau
Leur arbre

Dans chaque situation qui semble horrible, des fleurs et même des fruits peuvent en ressortir !

Une bataille à finir


13 octobre 2021 : Je dors toujours avec mon petit bout de leur couverture. Je pense souvent à eux et l’autre jour en lisant un récit d’une naissance non assisté de jumeaux je me suis demandé si j’avais fait le bon choix. Je crois que tout ce cheminement et cette bataille m’a aidé à faire mon deuil, renforcir ma décision et être en paix avec celle-ci… mais je prends toujours le temps de regarder leur arbre le matin, je pense à eux au moins une fois par jour et je me surprends à flatter mon ventre de temps en temps. Je ne sais pas si c’était la dernière fois que je portais la vie et ça me fait un peu de peine de penser que c’était ça ma dernière expérience… en même temps, je souris à penser que ce pourrait être la dernière. J’ai pu, avec cette bataille, leur offrir la naissance que j’aurais voulu pour eux, j’ai pu enfin savoir ce que c’est que d’avoir une connexion avec son/ses bébé.s, j’ai pu poser un nouveau regard sur ma/la maternité et j’ai pu me rapprocher de mon chum durant cette épreuve. Mon shutdown que j’ai vécu le 10 septembre n’est pas encore totalement revenue. Je dois réapprendre à m’apprivoiser et je dois me laisser le temps. Je suis tellement reconnaissante d’avoir près de moi un partenaire aussi compréhensif et qui m’aime. Je suis reconnaissante d’avoir eu plusieurs anges sur mon chemin pour m’accompagner durant cette épreuve. Je suis heureuse d’avoir eu les connaissances que j’ai pour pouvoir vivre cette expérience en pleine conscience et selon mes termes! C’est pourquoi je prends le temps d’écrire mon histoire! Je souhaite que les tabous vis-à-vis l’avortement diminuent, que l’accessibilité à l’avortement ET au choix de la technique soit plus grande, que les personnes qui vivent cette situation sachent qu’il y a cette option de disponible et que ce n’est pas obligé d’être un mauvais souvenir. Ça peut être doux et beau! Je tiens aussi à dire qu’après coup, j’ai su que le chef gynécologue de ma région avait transmis le document des nouvelles recommandations (et ce avant mon histoire) à son équipe et que la directive était de faire la procédure jusqu’à 70 jours… Je n’aurais pas dû avoir besoin de faire toute cette bataille. Cette histoire est à suivre car je pense fort à faire une plainte.

Je n’aurais pas dû avoir besoin de faire toute cette bataille

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